Christophe Guilluy est géographe et est connu en particulier pour ses précédents ouvrage La France périphérique, et le Crépuscule de la France d’en haut. A l’aide de chiffres et de documents il explique le développement de quelques grandes métropoles qui profitent du processus de mondialisation, pendant que le reste du pays – la France périphérique – se retrouve déclassée, mise à l’écart.
Dans le Crépuscule de la France d’en haut, Guilluy soutenait que les élites feignaient d’ignorer l’existence de cette autre partie du pays. Il espérait que les élites se décideraient à prendre enfin en considération la France périphérique, sous peine d’un risque d’affrontement.
On peut considérer cette analyse comme la prédiction des Gilets Jaunes.
No Society prolonge ces derniers ouvrage et va plus loin. Publié en septembre 2018, soit 2 mois avant les premières manifestation de Gilets Jaunes, on peut trouver ce livre prophétique et riche d’enseignement pour ce qui surviendra probablement plus tard.
Guilluy montre bien que le divorce entre élites et reste de la population est consommé. Ce phénomène de rupture se généralise de plus dans le reste du monde en particulier aux pays de l’OCDE. Il explique que les métropoles ne peuvent techniquement vivre hors sol de leur substrat territorial. De plus, la zone périphérique est majoritaire. Ce qui condamne de fait les métropoles à perdre d’avance ce combat.
Le titre du livre, no society, exprime l’idée qu’une société est un tout. Elle a besoin de ses élites et de son peuples et que ceux-ci communiquent. Sans cela, il n’y a plus de société.
Très riche, le livre de Guilluy détaille bien tous les processus qui ont conduit à cette situation paradoxale. Il évoque les problèmes de la dette, de la loi de 73 et aussi largement l’immigration. C’est un livre qui se veut rassurant et réconfortant, tout en évoquant les inquiétudes monumentales pour l’avenir.
Considérant Trump comme un membre d’une partie de l’élite qui s’appuie sur l’Amérique périphérique, Guilluy estime que le changement aura lieu lorsque certaines élites rejoindront le peuple.
En conclusion, on comprend que, d’après Guilluy, la périphérie est un effet secondaire non prévu de la mondialisation. C’est un phénomène naturel – Guilluy cite la common decency d’Orwell -, qui vient de la base, et qui ne cessera que lorsqu’une partie des élites aura rejoint cette dynamique pour recréer une nouvelle société plus juste, respectueuse de l’environnement et économiquement durable.
Cet ouvrage est vraiment intéressant. Il libère la parole. Il permet de comprendre le phénomène des gilets jaunes et de voir que celui-ci ne risque pas de s’arrêter. Nous vivons un moment positif de changement du monde après les années dîtes de la mondialisation.
Un commentaire
le problème c’est que les « zélites » ont changé de société. D’une société verticale et nationale, elles ont muté vers une société horizontale ou stratifiée et universelle. Chaque couche, la supérieure et l’inférieure est sensée ne pas pénétrer l’autre et en théorie il y règne une certaine égalité: en bas un égalitarisme féroce et en haut une égalité disons aristocratique, on se reconnait comme étant du même monde