J’ai eu la chance début décembre d’assister à l’une des représentations données au théâtre Olympia à Tours du spectacle Fraternité, Conte Fantastique de Caroline Guiela Nguyen.
C’est la première fois que je me rendais à un spectacle au théâtre Olympia, ne connaissant cet endroit que de nom, en tant que lieu d’expression du théâtre contemporain.
J’ai été très agréablement surpris par la mise en scène, capable d’animer les planches de nombreux effets spéciaux, projections vidéos, éclairages, illusion d’un monde intérieur et extérieur, sous-titres vivants intégrés au décors, facilitant l’immersion dans une œuvre à mi-chemin entre la science-fiction et le fantastique.
Suite à une mystérieuse éclipse, la moitié de la population terrestre a disparu, entraînant les rescapés à fréquenter des centres de soins pourvus de drôles de cabines où ils peuvent laisser des messages à leurs chers disparus.
D’origine vietnamienne, on comprend au travers de l’œuvre de sa créatrice, la référence notamment aux tristes événements qu’a pu connaître ce pays et le Cambodge tout proche dans la deuxième moitié du XXème siècle.
Cette pièce date d’avant la période Covid, et pourtant, étonnante coïncidence, on pourrait penser qu’elle ne cesse d’y faire allusion, au travers des disparus – les morts, les confinés -, le désespoir émotionnel, le besoin de s’exprimer, d’extérioriser ses sentiments après la période d’enfermement que tout le monde a pu connaître, et d’offres de soins – la vaccination et le passe-sanitaire – qui sont proposées aux personnes souffrantes.
On pensera aussi beaucoup à la vie dans les quartiers des grands centres urbains français, où parfois certains centre-sociaux donnent l’impression de s’acharner à donner un semblant de vie à des éternels déracinés, des êtres perdus dans la misère d’âme du quart monde empreinte de pauvreté et de détresse psychologique et matérielle, sans être capable d’offrir espérance et véritable intégration dans un monde apaisé.
On sent une grande chaleur humaine dans le déroulé de cette pièce de théâtre, amplifiée quand on sait qu’une partie des acteurs est à l’origine amateur, ce qui se discute maintenant après plus d’une centaine de représentations.
C’est également une très belle œuvre musicale : comment ne pas être ému par la magnifique voix de contre-ténor d’un des acteurs, ou le naturel expressif des deux jeunes rappeuses ? Une autre agréable musique est celle des multiples langues employées, le français, l’anglais, le vietnamien et l’arabe.
Fraternité, conte fantastique, est une œuvre philosophique, un grand moment de spectacle, capable de nous émerveiller, de nous emporter dans un monde perturbant qui nous rappelle le nôtre où la plus grande des richesses est certainement la douceur de la fraternité humaine.
2 commentaires
La présentation de ce spectacle décrite est d’une vérité incroyable.
J’ai vu ce spectacle, mis à part tout le décors de la salle, c’était à l’Odéon à Paris,était très émouvant j’en garde encore ce souvenir, cette tristesse qui se lisait en chacun des acteurs.
Cette espérance aussi de revoir un jour nos disparus.
Et enfin , l’apparition de cet « ange » venu de l’au delà, réconforter avec cette voix douce et profonde,sa démarche assurée, ceux qui avaient l’air d’attendre des jours meilleurs.
Merci à ce metteur en scène pour avoir penser à nous faire prendre conscience de la beauté de la vie.
Peut-être faudrait-il un jour donner aux martiniquais,le bonheur de vivre ce spectacle.
Merci Stéphane d’être venu nous voir et d’avoir écrit ce bel article ! Ravie que le spectacle t’ai plu.